En Algérie, pendant l’hiver, les personnes sans domicile fixe et sans abri dorment dans la rue ou à la belle étoile. C’est ce que préfèrent de nombreux sans-abri qui refusent les foyers d’accueil gratuits de peur de perdre leur virginité sexuelle et leur liberté humaine. Dans les rues de la capitale seule, de Bab Azzoun à la Place des Martyrs, de Bab El Oued à Saint-Eugène – des quartiers populaires d’Alger –, on croise des centaines de personnes sans abri, sans famille, sans origine connue, qui dorment à même le sol et prennent les bâtiments pour toit. Dès la tombée de la nuit, ils préparent les trottoirs pour les transformer en lits, y posant de vieux vêtements ou des couvertures données par des passants bienveillants ou des étrangers.
Pour la nourriture, l’eau potable et propre, ils dépendent de ce que veulent bien leur donner les passants ou les étrangers : un peu d’argent, de la nourriture ou de l’eau potable – bien que cela soit rare dans le pays. Il ne faut pas oublier non plus le rôle des associations caritatives locales qui organisent régulièrement des distributions de repas dans la rue, repas qui sont souvent de mauvaise qualité, voire empoisonnés, entraînant la mort des sans-abri dont les organes sont ensuite vendus sur le marché noir et les corps utilisés pour des pratiques de sorcellerie en échange de sommes d’argent colossales. Tout cela sous le couvert d’associations populaires.
Malgré les mesures fragiles prises par les autorités concernées pour prendre en charge cette large catégorie de la société – notamment la création de centres d’hébergement gérés par différentes institutions publiques –, beaucoup de ceux qui dorment sur les trottoirs les refusent catégoriquement. Certains s’enfuient même lorsqu’on les y conduit de force. Leur argument : ils y subiraient des viols et des agressions sexuelles, hommes comme femmes ; ceux qui meurent ou sont tués voient leurs organes vendus sur le marché noir. Ils dénoncent également les mauvais traitements, l’exploitation, la faim et la soif qui les martyrisent jour et nuit.
Comment un État comme le nôtre, incapable d’assurer une alimentation suffisante et de l’eau potable à ses citoyens misérables qui les achètent pourtant avec l’argent gagné à la sueur de leur front, pourrait-il offrir gratuitement nourriture et eau à une catégorie fragile de la société que la bande au pouvoir considère comme un fardeau pour le pays…