La cinquième chambre criminelle tunisienne, spécialisée dans les affaires de terrorisme, a condamné l’ancien Premier ministre Ali Larayedh à 34 ans de prison pour avoir envoyé des djihadistes en Syrie combattre le régime de l’ancien président Bachar el-Assad, une affaire connue sous le nom de « réseaux de trafic ». Huit accusés ont été condamnés à des peines de prison allant de 18 à 36 ans, assorties de cinq ans de surveillance administrative. Parmi eux figurent l’ancien Premier ministre et vice-président du mouvement Ennahda, Ali Larayedh, ainsi que d’anciens responsables des services de sécurité, Fethi Beldi, Abdelkrim Labidi, Noureddine Guendouz, Lotfi Hammami, Hicham Saadi, Sami Chaar et Seifeddine Rais.
Les détenus sont accusés d’avoir « utilisé le territoire tunisien pour commettre des crimes terroristes contre un pays étranger et ses citoyens, aidé des groupes armés à quitter le territoire tunisien légalement ou illégalement, et financé cette opération », selon l’Agence de presse tunisienne (TAP). La question de l’envoi de combattants en Syrie a été soulevée suite à une plainte déposée par l’ancienne députée Fatima Al-Masdi, du parti Nidaa Tounes, en décembre 2021, avant d’être déférée devant le Tribunal spécial antiterroriste. De son côté, Larayedh a nié les accusations portées contre lui par le juge, affirmant ne pas être « complice de violence et de terrorisme ». Il a également qualifié la décision du tribunal de « motivée politiquement ». Le mouvement Ennahda a déclaré que l’affaire était « politique et visait à la vengeance contre Larayedh, dans le but de monopoliser le peuple tunisien et d’exclure un parti politique actif ». Le leader d’Ennahda, Premier ministre de 2013 à 2014, est considéré comme l’un des opposants politiques les plus virulents au régime du président Kaïs Saïed.
Il convient de noter que le verdict contre Larayedh est intervenu une semaine seulement après l’arrestation d’Ahmed Sawab, figure emblématique de l’opposition, pour des propos attaquant le pouvoir judiciaire, dans le cadre d’une vaste campagne d’arrestations visant des opposants politiques, des professionnels des médias et des hommes d’affaires pour diverses accusations. L’arrestation de ces figures de l’opposition a suscité l’indignation de l’opposition tunisienne, qui y a vu une « dangereuse escalade et une consolidation du régime autoritaire en Tunisie ».
